DOI: https://dx.doi.org/10.12795/rea.2025.i50.05

Formato de cita / Citation: Benaissa, M., & Gartet, J. (2025). Rockfalls in the Zireg watershed: factors of genesis and mapping of risk zones (Middle Atlas - Morocco). Revista de Estudios Andaluces,(50), 90-109. https://dx.doi.org/10.12795/rea.2025.i50.05

Correspondencia autores: mohamed.benaissa1@usmba.ac.ma (Mohamed Benaissa)

CC BY-NC-SA 4.0.

Les chutes de blocs dans le bassin versant Zireg: facteurs de genèse et cartographie des zones à risques (Moyen Atlas - Maroc)

Rockfalls in the Zireg watershed: factors of genesis and mapping of risk zones (Middle Atlas - Morocco)

Desprendimientos de rocas en la cuenca del Zireg: factores de origen y cartografía de las zonas de riesgo (Atlas Medio - Marruecos)

Mohamed Benaissa

mohamed.benaissa1@usmba.ac.ma 0009-0004-6716-6512

Université Sidi Mohamed Ben Abdellah – Fès. Laboratoire Espace, Histoire, Dynamique et Développement durable.
Faculté Polydisciplinaire Taza. Route d’Oujda–B.P. 1223, Taza, Maroc.

Jaouad Gartet

jaouad.gartet@usmba.ac.ma

Université Sidi Mohamed Ben Abdellah – Fès. Laboratoire Milieux naturels, Aménagement et Dynamiques Socio-spatiales. Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Saïs-Fés. BP 59 Route Immouzer. 30000 Fès, Maroc.

INFO ARTÍCULO

RÉSUMÉ

Reçu: 10/02/2025

Révisé: 04/04/2025

Accepté: 28/04/2025

MOTS-CLÉS

Chute de blocs

Modélisation

Bassin versant Zireg

Moyen Atlas, Maroc

Les chutes de blocs se caractérisent par la séparation soudaine d’une masse rocheuse depuis un versant incliné, descend rapidement vers l’aval sous l’influence de la gravité. Ces événements représentent l’un des risques les plus courants dans les zones montagneuses, pouvant causer des dommages à l’homme et aux biens, ainsi que générer des frais financiers significatifs, surtout lorsqu’ils touchent des maisons et des infrastructures essentielles (routes, chemins de fer et lignes électriques...). Ainsi, l’étude du risque de chutes de blocs est cruciale pour améliorer leur prévention et atténuer leurs impacts. Elle est aussi essentielle pour évaluer comment ce risque se déclenche, en fonction des conditions géographiques. L’estimation des degrés de risque de chutes de blocs exige l’accès à des informations précises et à une méthode d’analyse détaillée associées à une solide perspective géomorphologique en fonction du but visé. Pour cela, la méthode employée prend en compte les facteurs clés qui déclenchent la formation de blocs en chute et leur descente (lithologie, pente et occupation des sols) dans le bassin versant Zireg (Moyen Atlas, Maroc), en s’appuyant sur un modèle qui quantifie l’importance de chaque composant. Les caractéristiques géomorphologiques du bassin versant Zireg, se distingue par son relief dynamique et sa morphologie irrégulière, marquée par des pentes raides et modelées dans un matériel carbonaté et schisteux, sensible aux chutes de blocs. Il enregistre une morphogenèse active amplifiée par l’agressivité du climat méditerranéen. D’après l’étude descriptive, Nous avons montré que 4% de la superficie totale est marquée par des degrés de risques fort et très fort, liées essentiellement à la présence des versants de roches carbonatées, pentes élevées à très élevées et une couverture végétale de faible ou moyenne densité.

KEYWORDS

ABSTRACT

Rockfall

Modeling

Zireg watershed

Middle Atlas

Morocco

Rockfalls are characterized by the sudden separation of a rock mass from a slope, which rapidly descends downstream under the influence of gravity. These events represent one of the most common hazards in mountainous areas, potentially causing damage to people and property, as well as generating significant financial costs, especially when they affect homes and critical infrastructure (roads, railways, and power lines). Therefore, studying rockfall risk is crucial to improve their prevention and mitigate their impacts. It is also essential to assess how this risk is triggered, depending on geographical conditions. Estimating rockfall hazard levels requires access to accurate information and a detailed analysis method, combined with a sound geomorphological perspective, depending on the intended purpose. To this end, the method used takes into account the key factors that trigger the formation of falling blocks and their descent (lithology, slope, and land use) in the Zireg watershed (Middle Atlas, Morocco), relying on a model that quantifies the importance of each component. The geomorphological characteristics of the Zireg watershed are distinguished by its dynamic relief and irregular morphology, marked by steep, shaped slopes in carbonate and schistose material, sensitive to rockfall. It records active morphogenesis amplified by the aggressiveness of the Mediterranean climate. According to the descriptive study, we have shown that 4% of the total area is marked by high and very high degrees of risk, linked essentially to the presence of carbonate rock slopes, high to very high slopes and low or medium density plant cover.

PALABRAS CLAVE

RESUMEN

Deslizamiento de montaña

Modelado

Cuenca hidrográfica de Zireg

Atlas Medio

Marruecos

Los desprendimientos de rocas se caracterizan por la separación repentina de una masa rocosa de una pendiente inclinada, que desciende rápidamente río abajo bajo la influencia de la gravedad. Estos eventos representan uno de los riesgos más comunes en zonas de montaña, capaces de causar daños a personas y bienes, además de generar importantes costes financieros, especialmente cuando afectan viviendas e infraestructuras esenciales (carreteras, ferrocarriles y líneas eléctricas, etc.). Por ello, el estudio del riesgo de desprendimientos de rocas es crucial para mejorar su prevención y mitigar sus impactos. También es esencial evaluar cómo se desencadena este riesgo, dependiendo de las condiciones geográficas. Para estimar los niveles de riesgo de caída de rocas es necesario tener acceso a información precisa y a un método de análisis detallado combinado con una perspectiva geomorfológica sólida en función del propósito previsto. Para ello, el método utilizado tiene en cuenta los factores clave que desencadenan la formación de bloques de caída y su descenso (litología, pendiente y usos del suelo) en la cuenca del Zireg (Atlas Medio, Marruecos), basándose en un modelo que cuantifica la importancia de cada componente. Las características geomorfológicas de la cuenca del Zireg se distinguen por su relieve dinámico y su morfología irregular, marcada por fuertes pendientes formadas por materiales carbonatados y esquistosos, sensibles a los desprendimientos de rocas. Registra una morfogénesis activa amplificada por la agresividad del clima mediterráneo. Según el estudio descriptivo, hemos demostrado que un 4% del área total se encuentra marcada por grados de riesgo alto y muy alto, vinculado principalmente a la presencia de laderas de roca carbonatada, pendientes altas a muy altas y cobertura vegetal de densidad baja o media.

1. INTRODUCTION

Les chutes de pierres sont un type d’événement provoquant des pertes massives, où des blocs rocheux, isolés ou multiples, se détachent d’une pente, se déplacent vers le bas et finissent par s’immobiliser au pied de versant (Whalley, 1984; Cruden & Varnes, 1996). Un risque courant pouvant occasionner des menaces significatives pour les infrastructures et la sécurité publique. Ce genre de risque devient de plus en plus courant, puisque les populations se déplacent vers des régions à risques en quête d’autres opportunités (climat plus humide dans les régions montagneuses, attraits touristiques,…). Une compréhension approfondie des chutes de pierres pourrait réduire le risque qu’elles représentent en tant que phénomène naturel.

L’intensité des chutes de pierres peut fluctuer considérablement, certaines d’entre elles, dénommées avalanches de pierres, pouvant atteindre plusieurs centaines de milliers de mètres cubes (Paranunzio et al., 2016). Alors que d’autres, situés à l’autre bout du spectre observable, pourraient avoir un diamètre ne dépassant même pas le centimètre, voire moins (Matsuoka, 2019). C’est le résultat de plusieurs processus conduits essentiellement par les conditions climatiques. Plusieurs études (Delonca et al., 2014; D’Amato et al., 2016; Matsuoka, 2019; Zielonka et al., 2019; Bajni et al., 2021; Birien & Gauthier, 2023) ont démontré que les facteurs climatiques tels que les précipitations et le cycle quotidien de gel-dégel peuvent provoquer ou entraîner des chutes de pierres.

L’analyse des chutes de blocs s’articule autour de diverses questions en fonction de la perspective et du but de l’étude, ce qui empêche de circonscrire le problème dans une seule recherche. Malgré les recherches existantes, les chutes de pierres demeurent un phénomène complexe à quantifier et à comprendre, en raison de la grande diversité des environnements dans lesquels elles peuvent se produire et des différents moyens utilisés pour les identifier, les détecter et les quantifier (Malsam, 2024). De ce fait, les recherches privilégient la formulation de leurs problématiques en lien avec l’environnement analysé. Bien que de nombreuses études aient été menées sur les relations entre les chutes de pierres et les conditions météorologiques, il est important de poursuivre l’analyse de ces relations afin de comprendre à long terme les similitudes et les différences entre la façon dont elles se manifestent sous différents climats (côtier, haute montagne, aride, etc.) et pour différentes conditions géologiques et de pente (Malsam, 2024).

Les endroits où les ruptures peuvent se produire et la probabilité de rupture individuelle de chaque masse rocheuse potentiellement instable ne sont pas donnés par l’approche historique (Frayssines, 2006). Les conditions climatiques peuvent affaiblir les masses rocheuses, augmentant ainsi le risque de chutes de blocs plus graves, résultant de divers processus qui favorisent la fissuration des roches. Selon la localisation du site de recherche, les chercheurs sont amenés à focaliser leurs efforts sur la préparation des blocs sur place et également sur leur trajectoire post-genèse.

Les montagnes du Moyen Atlas au Maroc font partie des zones montagneuses exposées au danger de chute de blocs. Leur climat se distingue par des hivers froids et des étés secs, avec une grande variation thermique quotidienne. Ces conditions encouragent la fragmentation des roches. La présence de roches carbonatées, de pentes inclinées et de zones forestières d’une densité moyenne, encourage un mouvement dynamique des blocs rocheux sur les pentes, ces éléments viennent s’ajouter au mouvement tectonique du Moyen Atlas. Le moyen Atlas est le siège d’une activité tectonique, néotectonique et sismique importante (Michard, 1976; Ramdani et al., 1980; Charrière, 1990; Hinaje et al., 2001).

L’étude des chutes de blocs dans la chaîne du Moyen Atlas demeure indispensable en raison de leurs propriétés qui contribuent à l’initiation de ce phénomène. L’article suivant met l’accent sur la mise en valeur d’une approche nouvelle pour détecter le risque de chute des pierres et blocs potentiellement instables sur les versants du bassin versant Zireg qui représente un paysage du Moyen Atlas. Cela est accompli par une connaissance détaillée des conditions lithologiques qui participent à la formation des pierres et blocs, ainsi que les facteurs qui affectent leur descente ultérieure (inclinaison et occupation des sols) via l’usage du SIG.

Les Systèmes d’Information Géographique proposent une approche efficace pour l’analyse et le traitement des données géographiques spécifiques. La cartographie offre une représentation graphique des données spatiales, intégrant des instruments qui simplifient la modélisation et l’analyse des informations pour traiter le problème des chutes de blocs. L’usage de cartes thématiques conjointes pour l’étude de ce phénomène offre un avantage supplémentaire. Cette méthode constitue un progrès significatif dans le domaine des recherches en géomorphologie, mettant en évidence leur aptitude à examiner les liens entre les informations géographiques.

Cette recherche rehausse l’attractivité touristique des paysages alentours (Bab Boudir, Parc National de Tazzeka), protège les usagers des voies limitrophes et ouvre aussi la voie à une nouvelle méthode pour décrire les chutes de blocs d’autres chaînes montagneuses.

2. PRESENTATION DE LA ZONE D’ETUDE

Le bassin versant Zireg est situé sur la rive gauche du bassin versant Inaouène (figure 1), représente une partie des montagnes du Moyen Atlas. Il s’étend sur une superficie de 73,2km² entre les parallèles 34°2’46" et 34°10’19" de latitude Nord, ainsi que les méridiens 4°10’23" et 4°20’31" de longitude Est. Ce bassin versant est situé dans la province de Taza, intégrée à la région Fès-Meknès. On le trouve sur les communes Bouchfaa, Ghiyata Al- Gharbia et Bou-Hellou. Il présente une petite extension vers le nord.

Le bassin versant Zireg présente une combinaison de divers paysages morphologiques manifestés dans les montagnes, les collines et les dépressions. Les altitudes les plus élevées du bassin se trouvent au sud, franchissant les limites de 1900 m, en particulier au sommet de Tazekka (1980 m). En revanche, les lieux les plus basses sont localisés dans la plaine alluviale de l’Ouèd Inaouène, où on constate que l’altitude peut descendre en dessous de 300 m.

Figure 1. Situation géographique du bassin versant Zireg. Source: élaboration personnelle basée sur le Modèle numérique d’élévation, 30m). a: Bassin versant Sebou par rapport au Maroc, b: situation du bassin versant Inaouène, c: Localisation du bassin versant Zireg, d: Carte hypsométrique du BV Zireg.

Ce bassin versant se distingue par la présence de roches de nature sédimentaire, métamorphique et volcanique. Des recherches géologiques et hydrostratigraphies ont révélé une diversité lithologique au sein des formations enfouies et en surface, composées respectivement de schistes du Paléozoïque et de formations argileuses du Trias à faible perméabilité. Ces dernières sont superposées ou juxtaposées par des formations carbonatées liasiques perméables (Colo, 1961; Mathieu, 1964; Benshili, 1989; Laville et al., 1989; Sabaoui, 1998).

Une diversité végétale significative caractérise le bassin versant Zireg, cette variété est particulièrement marquée dans les sommets du Moyen Atlas septentrional au sud (partie supérieur du bassin versant). Dans cette zone, la végétation est principalement dominée par le chêne vert et le chêne-liège. Outre ces deux sortes de formations, le paysage abrite des zones présentant une végétation mixte, incluant une diversité de plantes, des forêts artificielles à feuilles caduques et conifères, du chêne, le cèdre du mont Tazekka, du thuya et du pin.

L’analyse d’image satellite Landsat 8 du 15 juin 2019 a mis en évidence une variation inégale de la densité de la couverture végétale dans ce bassin (figure 2). Près de 52 % de la zone présente une densité végétale allant de 50 à 75 %, englobant une superficie approximative de 38 km², en parallèle, 10 % de la zone montre une densité variant entre 75 % et 100 %, englobant une surface approximative de 7,3 km². Le taux de couverture forestière est un élément qui affecte la stabilité des masses rocheuses sur une pente à travers différents processus clés. Un de ses éléments essentiels est la fragmentation in situ de la roche et l’immobilisation des blocs, ou la végétation diminue la vitesse de propagation.

Figure 2. Carte du taux de recouvrement végétale du bassin versant Zireg. Source: travail personnel basé sur Image Landsat 8, 15 juin 2019, 30m.

Les régimes pluviométriques sont un facteur indéniable dans l’occurrence des mouvements de terrain. La vitesse de propagation des processus de fragmentation des roches est accélérée ou ralentie par la teneur en eau des roches. En ce qui concerne les précipitations, les stations de Bab Azhar et Bab Boudir (figure 1c) enregistrent les plus importantes précipitations annuelles dans le bassin versant Inaouène (Benaissa, 2024). La station de Bab Boudir reçoit plus de 1000 mm tandis que la station de Bab Azhar accueille plus de 750 mm pendant les années pluvieuses (Naoura, 2012).

Concernant la température pour la station de Bab Boudir, les mois de décembre, janvier, février et mars sont les plus froids, avec une moyenne minimale enregistrée en janvier (-2°C). Les mois de juin, juillet, août et septembre définissent la période estivale, avec une température maximale moyenne enregistrée en août (38°C) (Benaissa, 2024). Cela met en évidence la pertinence des processus d’hydroclastie et de cryoclastie (fragmentation des roches). La fréquence des instabilités rocheuses mineures augmente significativement en raison des cycles de gel-dégel hivernaux et des précipitations modérées (Losasso et al., 2018).

L’activité agricole dans le bassin versant Zireg est limitée en raison d’un manque de terrain plat, sauf dans certaines dépressions ou sur des pentes faibles (photos 1 et 2). Au cours des dernières années, la succession d’années sèches incite les jeunes de la communauté locale à émigrer vers d’autres centres urbains pour assurer leur stabilité financière et établir un environnement propice à l’éducation des enfants. Cette situation est due à un manque d’infrastructures adéquates pour le transport entre la zone de recherche et le centre urbain voisin (Oued Amlil), même si la distance n’excède pas 20 kilomètres. Cela conduit à une densité de population réduite dans le bassin versant.

Photos 1 et 2. La disposition des pentes du bassin versant Zireg est caractérisée par des surfaces inclinées qui entravent l’expansion agricole, malgré l’existence de conditions climatiques propices. Source: cliché, Benaissa, 03/2019.

3. MATERIELS ET METHODES

L’étude des mouvements de terrain de la classe chute de blocs et écroulement dans les versants du bassin versant atlasique Zireg, vise à donner des résultats descriptifs sur le degré de risque à partir d’une méthodologie bien définie, rassemble entre les principaux facteurs de genèse et les conditions de propagation.

3.1. Methodologie

Les chutes de pierres en haute montagne sont plus fréquentes et plus détaillées depuis quelques décennies (Gruber et al., 2004; Gruber et al., 2007; Ravanel et al., 2017). Les observations de terrain avant et après l’élaboration d’une méthodologie de travail reste une nécessité importante pour la détermination des facteurs responsables, les processus qui contrôlent la genèse et la propagation de blocs.

L’approche adoptée se fonde sur un diagnostic géomorphologique du bassin versant Zireg, durant lequel nous avons repéré les facteurs déclencheurs des chutes de blocs en nous basant sur la définition de Flageolet (Flagiollet, 1989). Les processus de thermoclastie, hydroclastie et cryoclastie sont marqués par les conditions climatiques qui facilitent la dégradation des roches (calcaire). En l’absence d’obstacles et sur une pente prononcée, les pierres et les blocs se dirigent vers le bas.

La méthode associe les trois éléments qui contrôlent la fabrication et le déplacement des blocs (pente, lithologie et occupation des sols), à travers une modélisation qui respecte l’importance de chaque facteur, les données ont été reportées sur un document graphique : cartes de synthèses. La carte a été ensuite présentée selon le mode cartographique : carte des degrés du risque lié à la classe de chute de blocs et écroulement.

3.1.1. Typologie des mouvements de terrain selon la classification de Flageollet (1989)

Depuis l’étude de Collin en 1846, qui a établi le volume déplacé comme critère de classification, l’identification et la caractérisation des mouvements de terrain demeurent une problématique essentielle pour un grand nombre de chercheurs. Les premières classifications étaient simple, parce qu’elles s’appuyaient sur des observations et des cas encore peu nombreux (Flageollet, 1989).

Les études antérieures catégorisent les mouvements de terrain selon différents facteurs tels que la nature du matériau, l’état de la pente, l’emplacement géographique et géologique, les propriétés géotechniques, etc., cela s’inspire des recherches d’experts renommés comme (Heim, 1882; Penck, 1894; Reynolds, 1932; Bendel, 1948; Rapp, 1960; Millies-Lacroix, 1981). D’autres chercheurs (Molitor, 1894; Ward, 1945; Brundsen, 1979) ont employé l’idée de mouvement, la nature et la vitesse du déplacement, moyen de transport) comme critère de classement.

Les mouvements de terrain présentent une diversité de processus qui façonnent le relief selon des mécanismes physiques (pente, lithologie) et anthropiques (activités agricoles et système d’occupation du sol). C’est pour cette raison que nous optons pour la classification de Flagiollet (Flagiollet, 1989), qui se focalise uniquement sur les processus géomorphologiques liés aux mouvements de terrain susceptibles d’engendrer des préjudices et des dommages concrets (tableau 1).

Tableau 1. Typologie des mouvements de terrain selon la classification de Flageolet, 1989, approche géomorphologique.

Classes

Conditions de genèse

Processus

Reptation

Sols et roches meuble homogènes

Gravité – Fauchage

Glissement

Roche homogène - Pendage incliné - végétation moyenne à dense

Rotation – Translation

Glissement écoulement

Matériaux fins / semi fluide - Pente faible à moyenne

superposition Glissement/Ecoulement

Écoulement

Matériaux mélangés - pente moyenne à forte - quantité d’eau suffisante

Mobilisation des débris en masse

Chute de blocs et de pierres et écroulement rocheux

Assise argileuse marneuse - Berge alluviale

Basculement et pivotement - Elargissement des fissures

Éboulement catastrophique

Précipitation intense - Pente faible

Eboulement d’une masse (collectif)

Tassement

Matière organique - Pente faible

Abaissement du niveau

Gonflement Rétraction

Changement d’humidité - Présence d’argile - Pente faible

Modification de la teneur en eau dans le sol

Affaissement Effondrement

Terrain compressible - Roche réservoir - Pente faible

Évolution du degré de vide souterrains

Source: élaboration personnelle selon la classification de Flageollet, 1989.

3.1.2. Consignes de l’approche utilisée

Sur la base de la classification des mouvements de terrain d’après Flageollet, nous avons ajusté une modélisation géomorphologique pour qu’elle corresponde aux processus de déclenchement et de déplacement lié à la classe chute de bloc, de pierres et écroulements rocheux (tableau 2). Ceci a été réalisé grâce à l’élaboration d’une méthode reposant sur le concept de la cartographie numérique, basée sur la simulation des facteurs responsables.

Tableau 2. Instructions de l’approche adoptée.

Classe

(classification de Flagiolet)

Facteurs déterminants

Facteurs mineurs

Facteurs non mesurables

(Longue période)

Groupe

(Abréviation)

Chute de pierres et de blocs et écroulement rocheux

  • Lithologie
  • Pente
  • Occupation du sol
  • Activité agricole
  • Feu de forêt
  • Maladies des plantes
  • Humidification-Sécheresse
  • Précipitation
  • Système racinaire

CE

Source: Thèse Benaissa, 2024.

Ce modèle est réalisé pour son adaptation avec les conditions causales de mouvements de terrain de la classe chute de blocs et écroulement dans le climat méditerranéen en général et particulièrement dans le bassin d’Inaouène. Des résultats préliminaires ont déjà permis de superposer et d’analyser plusieurs facteurs, tel que la pente, la dureté des matériaux (fragmentabilité et dégradabilité des roches) et le type d’occupation du sol.

Pour établir une carte des zones potentiellement affectées par la classe CE (chute de blocs et écroulement), nous avons réalisé une cartographie distincte afin d’obtenir les différentes cartes thématiques du risque, incluant la carte des classes de pente, la carte lithologique ainsi que la carte d’occupation des sols. L’empilement de ces cartes met en évidence les liens entre les divers indices d’instabilité.

3.1.3. Cartographie des degrés de risque liés à la classe chute de blocs et écroulement (CE)

A l’issue de cette méthodologie, nous aborderons les cartes de différents facteurs qui donnent des indications sur les conditions de stabilité du bassin versant Zireg et de dégager le degré de risque pour la classe chute de blocs et écroulement.

Carte des pentes (IP)

La pe nte reste un facteur fort dans tous les mouvements de terrain mais de manière variable, la pente élevée est de fort degré quand le risque d’instabilité de terrain est lié à la gravité. On a donc répartie la surface de la zone d’étude en quatre classes de pentes en fonction de sa raideur et de donné à ces différentes classes un indice de risque (IP), qui varie de 1 pour les pentes douces à 4 pour les pentes abruptes.

Carte lithologique (IL)

La lithologie dans le bassin versant étudié est très diversifiée. Les différents affleurements rocheux montrent des degrés de dureté variables allants de la roche fragile comme l’argile à la roche dure et cohérente comme le basalte.

La carte de simulation du risque liée à la lithologie exprime le degré de risque en fonction de la friabilité du substrat contre la classe chute de blocs et écroulement. Les affleurements très fragiles présentent le minimum de risque d’instabilité de terrain. En fonction de ce paramètre nous avons réparti les affleurements rocheux en cinq grands ensembles de roches:

Carte d’occupation des sols (IO)

La carte d’occupation des sols représente l’ensemble d’informations qu’on peut extraire par l’analyse d’une image satellitaire récente de forte résolution qui doivent être complétées par le travail de terrain. Il s’agit de différents types qui caractérisent la zone d’étude (culture sèche, terrain inculte, forêt dense, forêt moyennement dense, …).

L’occupation des sols reste un facteur majeur pour le déclenchement des mouvements de terrain de la classe CE (chutes de blocs et écroulement), Elle assure la stabilité de la couche supérieure et freine la descente des pierres et blocs le long du versant. La distribution des indices (IO) est la suivante :

Élaboration de la carte du risque

La carte du risque est une synthèse graphique qui fusionne les niveaux des facteurs déterminants (pente, lithologie et utilisation des sols), réalisée à l’aide du logiciel ArcGIS. Afin de simplifier la lecture de la carte de sommation des indices du risque, nous avons regroupé les valeurs de l’indice global (IG) en quatre grandes classes, nous avons, ainsi, ramené les résultats de probabilité à quatre niveaux du risque croissant selon ce tableau (tableau 3).

Tableau 3. La signification des résultats de l’approche adoptée.

Classe

Indice Globale (IG)

Signification des résultats

(Degré de risque)

Chute de pierres et de blocs et écroulement rocheux (CE)

[01 - 20[

Faible

[20 - 60[

Moyen

[60 - 80[

Fort

[80 - 100]

Très fort

Source: Thèse Benaissa, 2024.

Il est important de souligner que le niveau moyen de risque comprend deux niveaux (20-60), ce qui constitue une étape intermédiaire et cruciale. La modification négative d’un facteur d’instabilité favorise la prolongation du niveau de risque vers l’étape dangereuse. Pour faciliter la lecture et l’utilisation de la carte, nous avons utilisé une carte codée en couleurs standard pour représenter le risque, conformément au plan sémiologique. Le rouge clair indique un niveau de risque faible, tandis que le rouge intense traduit un niveau de risque élevé.

La carte des degrés du risque potentiel lié à la classe chute de blocs et écroulement (CE) représente une carte de synthèse finale, elle est dérivée de la conversion des valeurs de l’indice global du risque en quatre degrés du risque :

4. RESULTATS

L’étude qualitative des mouvements de terrain de la classe chute de blocs et écroulement (CE) dans le bassin versant Zireg commence par la réalisation des cartes analytiques selon les démarches de la méthode utilisée.

4.1. L’établissement des cartes analytiques

Le bassin versant Zireg possède des traits morphologiques favorisent la propagation des chutes de pierres et de blocs, où se concentrent les conditions favorables (facteurs déclencheurs).

La carte de pentes

Les chutes de pierres se produisent sur des pentes rocheuses presque verticales (Chen et al., 2009). Selon les directives de la méthode appliquée, la représentation des pentes indique que celles-ci sont considérablement fortes dans la majeure partie du bassin versant, et plus précisément au niveau de sa section supérieure (figure 3).

Figure 3. Carte des classes de pente du bassin versant Zireg. Source: élaboration personnelle basée sur le Modèle numérique d’élévation: MNE, 30m.

Le mouvement des blocs est accéléré par la pente d’un versant, conformément au principe de la gravité. En raison de la fragmentation locale de la roche, sa chute est maîtrisée selon l’inclinaison du talus et le volume qui a été déplacé. L’inclinaison a aussi un impact sur le rythme des ruisseaux sur le versant. Effectivement, une pente plus raide entraîne une durée de concentration des eaux plus courte sur les fissures, ce qui fait que le processus d’hydroclastie gagne en importance.

La répartition des classes de pentes selon les directives de la méthode utilisée dans le bassin versant Zireg montre que les pentes sont réparties d’une façon très irrégulière, 62% de la surface totale est de degré plus de 25 %, par contre les pentes faibles (inf. à 5 %) représentent seulement 4 % de la surface totale.

La carte de lithologie

La lithologie est fréquemment utilisée dans les études sur la vulnérabilité aux chutes de blocs. De nombreux auteurs travaillant dans divers milieux géologiques la considèrent comme le facteur de conditionnement le plus influent (Bounab et al., 2022; Jing, 2003; Shirzadi et al., 2012; Losasso et al., 2018; Mokhtari et al., 2020). Le bassin versant Zireg se caractérise par une lithologie comportant diverse types de roches (figure 4), les roches métamorphiques (Schiste), les roches sédimentaires (Calcaire) et les roches volcaniques (Basalte). Présentant des caractéristiques distinctes liées au processus de fragmentation.

Figure 4. Carte lithologique du bassin versant Zireg. Source: travail personnel basé sur la carte géologique de la chaîne Rifaine (1/500000) et l’outil SIG.

Au niveau du type de matériel et des caractéristiques minérales, le bassin versant Zireg présente une variété lithologique. On a distingué quatre ensembles en fonction de leur sensibilité à la chute de blocs et à l’écroulement (tableau 4).

Tableau 4. Distribution de la résistance des matériaux contre aux processus de chute de blocs dans le bassin versant Zireg, conformément aux instructions de la méthode utilisée.

Type de matériel

classe lithologique

superficie en km2

superficie en %

Calcaire

5

6.6

9

Galets - Roche volcanique très altéré - Schiste

4

53.4

72.7

Marnes – Argiles

1

4.5

6.1

Basaltes

5

7.4

10

Alluvion Quaternaire

3

1.6

2.2

Source: notre élaboration.

Les roches schisteuses (photo 3), grâce à leur aspect feuilleté découpées en plaques (schistosité), le plan de schistosité est perpendiculaire à l’axe d’aplatissement (la stratification). Les schistes sont plus ou moins clivables et très sensibles à la désagrégation physique par le gel, les dilatations différentielles, la pénétration des racines. Les roches basaltiques (photo 4) montrent une résistance considérable (tableau 5), et elles ne sont pas sujettes au risque des chutes de blocs, car elles se trouvent uniquement dans le chenal de l’Ouèd Zireg. Le calcaire, qui se situe au centre de la zone d’étude, est une roche de dureté intermédiaire. Toutefois, il est le plus analysé en raison du risque évalué, à cause des volumes considérables susceptibles de se décomposer.

D’après les caractéristiques géographiques, indiquées précédemment, cette région connaît des précipitations plus abondantes et des températures plus froides pendant l’hiver, tandis que l’été, elle est marquée par une chaleur intense. Ce sont des conditions favorisantes à l’initiation de processus qui menaçant la fragmentation de la roche (calcaire et schiste) sur site.

Photo 3. Les roches schisteuses, caractérisées par la présence de plans de schistosité, favorisent leur fragmentation. Photo 4. La présence de Basalte le long du chenal de l’Ouèd Zireg. Source: cliché, Benaissa, 03/2021.

Tableau 5. Résultats des essais de laboratoire sur la dureté des roches les plus représentées dans le bassin versant de Zireg.

Type de roche

Essais de dureté

Dureté

MDE (%)

LA (%)

Roche volcanique (Basalte)

07

10

Forte

Calcaire

12

17

Moyenne

Schiste

Plus de 30

Faible

Source: notre élaboration.

MDE: Essai micro – Deval a pour but la détermination de la résistance à l’usure par le frottement réciproque des éléments d’un granulat. La norme européenne EN 1097-1 permet de déterminer le coefficient de micro-Deval.

LA: Essai Los Angeles permet de mesurer les résistances combinées aux chocs et à la détérioration progressive par frottement réciproques des éléments d›un granulat.

La carte d’occupation des sols

Concernant la situation géographique du bassin versant Zireg, caractérisée par des altitudes élevées (au-dessus de 1500 m), un climat marqué par des précipitations importantes et une morphologie définie par des pentes élevées à très élevées, contribuent à établir une apparence forestière clairement visible dans ce paysage (figure 5).

Figure 5. Carte d’occupation des sols du bassin versant Zireg. Source: travail personnel basé sur image Landsat 8, 15 juin 2019, 30 m et l’outil SIG.

L’étude de la carte d’occupation des sols révèle que la forêt (forêt dense et forêt de faible densité) s’étend sur 66 % de la superficie total, distribuée entre les zones amont et médiane du bassin versant. Les matorrals représente 13 %, occupe des zones au sein de la forêt et dans la section médiane.

Le bassin versant Zireg subit une adaptation significative face à la faible pluviométrie annuelle (année sèche). L’année 2021/2022, qui est considérée comme une année sèche, a cependant été marquée par une productivité agricole accrue dans certaines dépressions du bassin versant. En effet, la baisse de température et le taux d’humidité durant la saison hivernale ont un impact crucial sur la saturation de la couche superficielle (sol).

La forêt dense qui se localise dans la partie amont, protège les versants contre le déclenchement des chutes de blocs. La présence d’autres versants de couverture végétale faible au sommet (forêt de faible densité, matorral), peut augmenter le niveau de risque.

4.2. La modélisation de la classe chute de blocs par l’approche utilisée

La modélisation des mouvements de chute de blocs par l’approche utilisée dans le bassin versant Zireg vise à décrire les degrés de risque (figure 6) à partir de la superposition des cartes thématiques (lithologie, pente et occupation des sols). Nous avons codé la réponse de chaque catégorie de roche face aux processus d’altération, l’effet de l’inclinaison sur le déplacement des roches, puis, l’état de la surface en relation avec la couverture végétale qui favorise la stabilité des blocs ou facilite leur descente en cas de couverture insuffisante.

Figure 6. Carte du risque associée à la classe chute de blocs dans le bassin versant Zireg. Source: travail personnel basé sur les directives de l’approche adoptée.

La forêt dense qui recouvre la quasi-totalité de la partie supérieure protège les versants contre les processus de fragmentation des roches, ce qui explique la rareté des incidents de chutes de pierres, c’est pourquoi nous constatons que les niveaux de risque faible et moyen occupent une vaste étendue. Dans le reste de la zone d’étude, on observe une forte corrélation entre les facteurs examinés, ce qui justifie la présence de niveaux de risques élevés et très élevés.

Dans le bassin versant Zireg, la modélisation du risque de chute de blocs démontre une corrélation proportionnelle avec les variables analysées. Cela signifie que les chutes de pierres et blocs sont géomorphologiquement liées aux pentes élevées et aux roches carbonatées en l’absence d’une couverture forestière dense. Le risque peut se présenter sur des pentes de niveau modéré, dans des régions forestières clairsemées et constituées de roches sujettes à la fragmentation (calcaire).

5. DISCUSSION

La partie supérieure du bassin versant est constituée de roches schisteuses, qui ont une dureté moyenne et se dégradent sous l’effet des éléments climatiques. Cependant, elles présentent la caractéristique de schistosité, ce qui entraîne des volumes produits très minimes. Il convient d’ajouter que la forêt dense et de densité moyenne dans cette portion protège la couche superficielle des processus d’érosion hydrique. Le phénomène de thermoclastie y est également faible en raison du microclimat particulier à l’intérieur de la forêt. Ces conditions contribuent aussi à la pédogenèse. C’est pourquoi nous notons que cette partie présente un degré de risque faible.

Les calcaires sont modérément altérés, mais présentent par endroits une forte altération et une érosion karstique, principalement le long des discontinuités tectoniques (Asteriou et al., 2025). Le processus de formation des blocs de roches carbonatées débute par une altération complexe de la roche sur son emplacement d’origine. Dans les environnements arides et semi-arides, des températures positives très élevées (jusqu’à 40°C) pourraient conduire à l’exfoliation et à la fracturation des masses rocheuses par le biais de cycles de stress thermique (Vargas et al., 2013; Collins et al., 2016).

D’après (Lamouroux, 1967), les roches carbonatées présentent trois types d’altération : l’altération de surface (mécaniques, chimiques et biologiques), l’altération pédologique (se produit à l’intérieur ou au contact du sol) et l’altération souterraine. L’analyse géomorphologique du bassin versant Zireg concernant l’érosion hydrique (altération de surface) révèle que 56 % de la superficie totale est caractérisé par des degrés d’états érosifs élevé et très élevé (Benaissa, 2024). Cela est dû à la présence d’une protection antiérosive faible et très faible, en particulier dans la section centrale du bassin versant. Ces conditions favorisent la propagation des roches. L’eau qui pénètre dans la roche peut geler et se dilater, élargissent ainsi les fissures naturelles sur la surface de rupture. La chute de blocs pourrait avoir été déclenchée par les secousses d’un tremblement de terre.

L’analyse des chutes de pierres a inclus la végétation, on a considéré que la densité d’arbres le long du trajet de chute a eu un effet notable. Dans les domaines de calcaire, le processus karstique entraîne la dissolution de la roche le long des niveaux, ce qui cause l’élimination effective du ciment naturel qui assure la cohésion de la masse rocheuse. Dans cette situation, étant donné que la végétation est formée de buissons de petite taille et que le bloc qui s’est détaché est assez volumineux, l’impact sur la dissipation d’énergie liée à la végétation reste modeste, d’après les observations de Moos et al. (2017). La végétation a un impact sur les caractéristiques de surface le long du trajet de l’éboulement, que ce soit en termes de roulis ou de rebond, et sa présence amplifie la dissipation d’énergie (Dorren et al., 2006) tout au long du parcours de l’éboulement.

Les chutes de blocs représentent un défi considérable pour les agriculteurs sur les terres en jachère et également sur les voies montagneuses. Ils exposent les usagers ainsi que le personnel à des dangers qui ne cessent de croître avec l’augmentation du trafic (route touristique de Zireg reliant Ouèd Amlil et Bab Boudir) d’une part, et par l’autre côté, par les travaux d’élargissement (figure 7).

Figure 7. Paysage géomorphologique des mouvements de terrain liés à la classe chute de blocs dans le bassin versant du Zireg. Source: cliché Benaissa, 12/2020. a: L’évolution des fissures sur les roches carbonatées résultant des processus de fragmentation au sommet du versant. b: Bloc de caractéristique carbonatée en bas de versant, à proximité de la route reliant Bab Boudir à Oued Amlil. c: Les sommets des versants carbonatés sont les zones les plus vulnérables aux phénomènes de thermoclastie et hydroclastie, en raison de la rapidité avec laquelle l’eau peut infiltrer à partir des fissures sur des surfaces relativement planes. d et e: Blocs probables de chuter sur un versant, marqué par la présence de maisons individuelles et de terres cultivées en bas. f: L’effet de l’érosion hydrique sur la propagation des roches qui deviennent favorables à d’autres mécanismes de fragmentation.

Un autre élément qui favorise l’initiation des processus de chute de blocs est les incendies de forêt. Ils affectent la forêt de Bab Azhar (Province de Taza), qui s’étend sur une grande surface dans le bassin versant Zireg. Selon (Hanchane et al., 2012), les régions forestières de la Province de Taza font partie des régions marocaines qui affichent un niveau de risque élevé de feu de forêts (Zitane, 1986). A ce titre, on signale l’incendie de forêts catastrophique de l’année 2000, à l’extrême sud-est de la Province, qui a ravagé, en 4 jours consécutifs, plus de 2270 ha de forêts de chêne vert et de steppe d’Alfa (Hanchane, 2007).

Dans le cadre d’une analyse comparative, le bassin versant Zireg présente les taux de susceptibilité au risque de chute de blocs et écroulement les plus importants que ceux observés dans des autres sous-bassins versant d’Inaouène (tableau 6). L’emplacement du bassin versant Zireg intègre les éléments analysés dans la formation de ce genre de risque, illustrés par les pentes abruptes, la lithologie carbonatée et les conditions climatiques propices à la fabrication des blocs (précipitation et température).

Tableau 6. Synthèse de susceptibilité aux mouvements de terrain de la classe chute de blocs et écroulement dans le bassin versant Inaouène.

Surface spatiale des degrés de risque (%)

Classe

Degré de risque

BV Al-Malha

BV Amlil

Prérif (moyenne)

BV Zireg

BV Bou-Hellou

Moyen Atlas

(moyenne)

BV Bou Lajraf

BV Inaouène

(moyenne)

Chute de blocs et Ecroulement (CE)

Faible

70

62

66

76

76

76

83

75

Moyen

30

36

33

22

23

22,5

16

23,8

Fort et T.F

-

2

1

4

1

2

1

1,3

Source: Thèse Benaissa, 2024.

La réduction du taux de couverture arborée sur les pentes favorise l’intensification des effets d’érosion hydrique, ce qui entraîne la dispersion de volumes rocheux importants à la surface.

Les pierres ou rochers fournissent un abri considérable pour la croissance des jeunes plants (Irifi, 2024). Parallèlement, les recherches sur les interactions entre la forêt et les chutes de pierres ont tendance à évoluer vers l’analyse des forêts de montagne comme moyen de protection contre les chutes de pierres (Bebi et al., 2001 ; Berger et al., 2002). Hétu et al., (2000) ont indiqué que la couverture forestière offrirait une protection efficace dans le cas d’événements de chutes de pierres de faible ampleur et de haute fréquence, mais ne pourrait pas empêcher les effets dévastateurs des événements de forte ampleur. Il convient de noter que le renouvellement d’une couverture arbustive peut entraîner une déstabilisation des matériaux rocheux dans le cadre du développement de systèmes radiculaires dans les fissures.

Il est évident qu’une attention particulière doit être accordée aux versants identifiés comme à risque élevé et très élevé, en élargissant la voie et en débutant la plantation des arbres depuis la base jusqu’au sommet du versant. L’objectif est de diminuer l’inclinaison à partir de surfaces planes dotées d’une forte concentration d’arbres afin de réduire l’énergie des blocs lors d’une chute.

6. CONCLUSION

L’établissement de la cartographie des chutes de blocs est une tâche complexe et minutieuse qui demande une solide compréhension des traits morphologiques. Il est particulièrement difficile de modéliser ce genre de déplacement, car les zones d’origine n’ont pas de caractéristiques géologiques et géomorphologiques comparables. Dans le cadre d’une étude concentrée sur le déclenchement et la propagation des blocs, on a utilisé la zone source et son parcours pour développer le modèle de sensibilité aux chutes de blocs. Un modèle qui s’appuie sur la représentation des facteurs tels que la pente, la lithologie et l’occupation des sols dans un climat particulier (précipitations élevées et importante amplitude thermique annuelle). L’analyse des chutes de blocs dans le bassin versant Zireg, effectuée grâce à l’approche utilisée, démontre que les particularités géomorphologiques du site constituent un fondement géomorphologique pour l’initiation des processus de mouvements de terrain de la classe chute de blocs et écroulement. L’étude a démontré que 4 % de l’ensemble du terrain est affecté par des niveaux de risque élevé et extrêmement élevé. Les facteurs étudiés facilitent l’apparition de risques plus ou moins sévères, d’où la nécessité d’utiliser la carte de risque comme point de référence pour envisager le développement de ce paysage, un modèle d’aménagement qui tient compte des perspectives géomorphologiques.

Responsabilités and conflits d’intérêts

Les auteurs s’engagent à divulguer tout conflit d’intérêts existant ou potentiel intérêt par rapport à la publication de cet article. De plus, les contributions des deux auteurs concernés sont présentées comme suit:

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