DOI:https://dx.doi.org/10.12795/rea.2024.i47.06

Formato de cita / Citation:Ntalakwa-Makolo, T., Sarah, K., Pemba-Bibiche, M., Luganga-Augustin, A., & Lubini-Ayingweu, C. (2024). Biomass and environmental services of the Pteridium aquilinum (Lin.) Kuhn population, herbaceous formations located in the Wamba valley in the Democratic Republic of Congo. Revista de Estudios Andaluces, (47), 119-136. https://dx.doi.org/10.12795/rea.2024.i47.06

Correspondencia autores: ntalakwakrios@gmail.com (Théophane Ntalakwa Makolo)

CC BY-NC-SA 4.0.

Biomasse et services environnementaux du peuplement de Pteridium aquilinum (Lin.), kuhn des formations herbacées localisées dans la vallée de la Wamba en République Démocratique du Congo

Biomass and environmental services of the Pteridium aquilinum (Lin.) Kuhn population, herbaceous formations located in the Wamba valley in the Democratic Republic of Congo

Biomasa y servicios medioambientales de Pteridium aquilinum (Lin.) Kuhn, en formaciones herbáceas localizadas en el valle de Wamba, de la República Democrática del Congo

Théophane Ntalakwa-Makolo

ntalakwakrios@gmail.com 0000-0003-3352-6294

Kisangala Sarah

kisangalasr@gmail.com 0009-0009-8983-3597

Mayanu Pemba-Bibiche

mayanubibiche5@gmail.com 0000-0001-2345-6995

Laboratoire Systémique, Biodiversité, Conservation de la Nature et Savoirs Endogènes,

Mention: Sciences et Gestion de l’Environnement. Faculté des Sciences et Technologie.

Université de Kinshasa, B.P. 190 Kinshasa XI, RD Congo.

Akatumbila Luganga-Augustin

augustinakatumbila@gmail.com 0009-0005-4949-5395

Département de Biologie. Institut Supérieur Pédagogique de la Gombe, B.P 3580 Kinshasa Kinshasa, RD Congo.

Constantin Lubini-Ayingweu

constantinlubini2014@gmail.com 0000-0001-2345-6996

Laboratoire Systémique, Biodiversité, Conservation de la Nature et Savoirs Endogènes, Mention: Sciences et Gestion de l’Environnement. Faculté des Sciences et Technologie. Université de Kinshasa, B.P. 190 Kinshasa XI, RD Congo.

INFO ARTÍCULO

RESUME

A reçu: 14-09-2023

Revu: 25-10-2023

Accepté: 08-11-2023

MOTS CLÉS

Biomasse

Carbone équivalent

peuplement

Pteridium aquilinum

Vallée de la Wamba

Cette étude sur la biomasse et services environnementaux de peuplement de Pteridium aquilinum des formations herbacées localisées dans la vallée de la Wamba en République Démocratique du Congo, vise la valorisation des ressources biologiques. L’objectif est celui d’évaluer la biomasse, le stock de carbone séquestré par le peuplement de l’espèce en vue de connaître sa contribution à la lutte contre le changement climatique. La démarche méthodologique se résume à des inventaires, récolte et identification des échantillons botaniques et la mesure de la biomasse. Après traitement et analyse des données, les résultats attestent que la biomasse totale de toutes les composantes (feuilles et rhizomes) s’élève à 6,07 t/ha; 2,75 t/ha de carbone séquestré et 22,27 t/ha d’équivalent carbone. Les individus de l’espèce contribuent à la lutte contre le changement climatique. Ces résultats démontrent l’importance des herbes vivaces dans la résolution des problèmes du climat.

KEYWORDS

ABSTRACT

Biomass

Carbon equivalent

Population

Pteridium aquilinum

Wamba valley

This study on the biomass and environmental services of Pteridium aquilinum populations in herbaceous formations located in the Wamba valley in the Democratic Republic of Congo, aims to promote biological resources. The objective is to evaluate the biomass, the carbon stock sequestered by the population of the species under study with a view to knowing its contribution in the fight against climate change. The methodological approach boils down to inventories, collection and identification of botanical samples and measurement of biomass. After processing and analysis of the data, the results show that the total biomass of all components (leaves and rhizomes) amounts to 6.07 t/ha; 2.75 t/ha of sequestered carbon and 22.27 t/ha of carbon equivalent. Individuals of this species contribute to the fight against climate change. These results demonstrate the importance of perennial grasses in solving climate problems.

PALABRAS CLAVE

Resumen

Biomasa

Carbono equivalente

Población

Pteridium aquilinum

Valle de Wamba

Este estudio sobre la biomasa y servicios ambientales de poblaciones de Pteridium aquilinum en formaciones herbáceas ubicadas en el valle de Wamba en la República Democrática del Congo, tiene como objetivo promover los recursos biológicos. El objetivo es evaluar la biomasa, el stock de carbono secuestrado por la población de la especie con el fin de conocer su contribución a la lucha contra el cambio climático. El enfoque metodológico se reduce a inventarios, recolección e identificación de muestras botánicas y medición de biomasa. Luego del procesamiento y análisis de los datos, los resultados muestran que la biomasa total de todos los componentes (hojas y rizomas) asciende a 6.07 t/ha; 2,75 t/ha de carbono secuestrado y 22,27 t/ha de carbono equivalente. Los individuos de la especie contribuyen a la lucha contra el cambio climático. Estos resultados demuestran la importancia de los pastos perennes en la solución de los problemas climáticos.

1. INTRODUCTION

Le monde entier se trouve actuellement confronté aux multiples défis écologiques qui menacent dangereusement son équilibre. Les phénomènes tels que le réchauffement climatique, les émissions des gaz à effet de serre, l’expansion des déserts, l’exploitation anarchique des forêts, le feu de brousse, sont parmi les problèmes environnementaux qui constituent une menace pour la planète (CCNUCC, 1992). Les plantes en général jouent un rôle important dans la réduction de la concentration des gaz à effet de serre par le processus de la photosynthèse (Lubini, 2003; Lubini et al., 2014; Belesi, 2009; Chave Riera & Dubais, 2001). Les herbes comme les arbres stockent le carbone au niveau de leurs parties aériennes (feuilles, et tiges) et souterraines (racines, rhizomes ou tiges souterraines) (Ntalakwa Makoloet al., 2022). Cependant, très souvent, quand on cherche des solutions d’adaptation et d’atténuation au changement climatique, on se focalise plus sur la protection des forêts et des espèces d’arbres (Bwangoy, 2013) sans toutefois accorder de l’importance aussi aux espèces de l’écosystème herbacé notamment sur les herbes vivaces qui interviennent également dans la séquestration de carbone et dans la lutte contre le changement climatique. Cette négligence des savanes ou des formations herbacées dans la lutte contre le changement climatique laisse alors place à la destruction des vastes étendues de ces formations herbacées par le feu de brousse. Cette situation constitue une forme de dégradation de l’environnement et des perturbations des processus écologiques.

Pteridium aquilinum est une herbe vivace de savane qui occupe une place importante dans le processus d’atténuation et d’adaptation au changement climatique, dans la mesure où, les individus de cette espèce forment des peuplements denses et homogènes. Ces individus sont aussi capables de réaliser la photosynthèse et de séquestrer le carbone atmosphérique. Il est donc important de pouvoir étudier la capacité de cette espèce vivace à pouvoir stocker une quantité de carbone.

Il est aussi nécessaire de signaler que plusieurs études sur la biomasse ont été réalisées en forêt tout comme en savane. Ces études se rapportent très souvent à l’estimation ou à l’évaluation de la biomasse des arbres des savanes, des forêts et/ou domestiques. Cependant, Il n’existe pas alors assez d’informations sur la biomasse des espèces d’herbes vivaces comme Pteridium aquilinum. Cette espèce a une valeur nutritive importante et c’est aussi une plante hôte des chenilles comestibles; qui nécessite une attention particulière et une domestication pour que la ressource soit gérer rationnellement. Dans le cadre de cette recherche, l’espèce Pteridium aquilinum qui forme des peuplements dans les formations herbacées, en climat tropical humide dans la vallée de la Wamba a été choisi pour évaluer la biomasse aérienne et souterraine ainsi que la quantité de carbone séquestrée par celle-ci. Ceci pour répondre aux exigences de la réduction de dioxyde de carbone atmosphérique nécessaire pour limiter la recrudescence des effets du réchauffement climatique. Cette recherche s’inscrit en même temps dans la logique de la conservation et la protection de l’espèce qui présente des vertus diversifiés pour les multiples usages. Il s’agit donc d’évaluer la biomasse, le stock de carbone et l’équivalent carbone et les services environnementaux du peuplement de Pteridium aquilinumdans les formations herbacées de la vallée de la Wamba en RDC, en vue de connaître la contribution de l’espèce dans la lutte contre le changement climatique et les possibilités de préserver les espaces couvertes de cette plante qui sont souvent dévastées par le feu de brousse. Dans les formations végétales herbacées de la vallée de la Wamba en République Démocratique du Congo figure une espèce: Pteridium aquilinum qui par endroit forme des groupements végétaux homogènes dans lesquelles elle prédomine et couvre d’importante surface. Pteridium aquilinum est une herbe à rhizome mais dont la partie aérienne est annuelle c’est-à-dire, en saison sèche, la tige aérienne est fréquemment brûlée. En période pluvieuse, celle-ci est renouvelée et forme un couvert parfois très dense couvrant ainsi le sol. Les caractéristiques morphologiques de la plante et les conditions climatiques locales permettent de penser aux considérations suivantes:

2. THEORIE SUR LA DESCRIPTION DE L’ESPECE PTERIDIUM AQUILINUM (LIN.) KUHN

Pteridium aquilinum est une espèce de la famille de Dennstaedtiaceae. Une fougère dont le synonyme est Pteris aquilina. Le nom vernaculaire en Kikongo: Kiongi, nteko, matekwa-tekwa, Biteku et Misili en Lingala (Kikongo et Lingala sont des langues officielles dans la région). Cette fougère dressée de 1 à 3 m de haut, pousse à partir des racines-tiges souterraines appelées rhizomes. Pteridium aquilinum est une plante ou herbe vivace qui se reproduit à partir des rhizomes ou également par des spores (reproduction par sporulation). Les individus ont une tige épaisse, arrondie, et poilue. Les feuilles sont composées et atteignent 45 cm de long, à contour triangulaire et lobé. Chaque feuille mesure environ 12 cm de long et souvent peut avoir 21 paires des feuillets.

2.1. Description botanique de l’espèce

L’espèce Pteridium aquilinum appartient au genre Pteridium, famille des Dennstaedtiaceae (ex. Hypolepidaceae), ordre des Blechnales, sous-classe des Polypodiidae, classe des Pteropsida, sous - embranchement de Pterophytina, embranchement des Pteridophyta, sous-règne des Tracheobionta, règne de Plantae, domaine des Eukarya. Cette plante a reçu de nombreux noms scientifiques, désormais non valides: Pteris aquilina, Asplenium aquilinum, Allosorusaquilinus, Ornithopterisaquilina, Filix aquilina, Filix-fæmina aquilina, Pteris latiuscula. En Afrique centrale on retrouve Pteridium aquilinum, etssp aquilinum centrali-africanum (Akobundu & Agyakwa, 1987; Uphof, 1968; Watt & Breyer-Brandwijk, 1962).

2.2. Habitat et distribution géographique

Pteridium aquilinum est une plante des formations herbacées et très souvent colonisent des champs des cultures. Elle est fréquente le long des pentes et sur le sol argileux. L’espèce est cosmopolite, avec une bonne adaptation dans les régions tropicales ou elle forme des peuplements avec des populations très homogènes et plus compactes (Wild, 1972; Arkinstall, 1979; Malaisse & Parent, 1980; Daeleman & Pauwels, 1983; Konda et al., 1992).

3. MATERIEL ET METHODES

3.1. Description du milieu d’étude: vallée de la rivière Wamba en République Démocratique du Congo

Cette recherche s’est effectuée dans les formations herbacées localisées le long de la vallée de la rivière Wamba autour de la cité de Kenge 2. Le milieu d’étude se situe à 04° 51’14,5’’ de latitude sud et 016°57’0,3’’ de longitude est, à 450 m d’altitude en moyenne. La carte suivante localise l’aire de l’étude.

Carte 1. Localisation de l’aire de l’étude dans la vallée de la rivière Wamba en RDC. Auteur: SBCNE; laboratoire de systémique, biodiversité, conservation de la nature et savoirs endogènes.

Cette recherche s’est effectuée dans le territoire de Kenge, province de Kwango en République Démocratique du Congo précisément dans la vallée de la rivière Wamba. La Wamba est une rivière de la République Démocratique du Congo qui prend sa source en Angola et coule du nord vers le sud. Elle fait partie des rivières qui forment le bassin hydrographique de la rivière Kasaï.

3.1.1. Le climat

La Région de la vallée de la Wamba bénéficie d’un climat bien arrosé, à tendance du groupe AW3 selon la classification de Köppen.

Il est classé dans la zone tropicale humide caractérisée par l’alternance de deux saisons à savoir: la saison pluvieuse et sèche. La saison sèche débute la premier quinzaine du mois de Mai jusqu’au 15 Aout; alors que la saison pluvieuse est la plus longue. Elle débute le 15 aout et est remplacée par la saison sèche au milieu du mois de mai. Cette dernière est entrecoupée par une courte saison sèche allant de la mi-janvier à mi-février.

Géographiquement, la région concernée par cette étude est située à 400 m d’altitude en moyenne par contre sa température moyenne annuelle varie entre 24 et 25° C avec un maxima de 26° C et un minima de 18° C. Ces derniers temps, on constate qu’il y a des perturbations des éléments climatiques (surtout pour la température et les précipitations).

3.1.2. Végétation

La vallée de la rivière Wamba en République Démocratique du Congo comprend deux types de formation végétale de la source jusqu’à sa confluence avec la rivière Kwango à Fayala. On distingue de ce fait: des formations herbacées dominées par les graminées et des forêts galeries à végétation semblable à celle de la forêt équatoriale dense humide. Actuellement la savane herbeuse domine dans les secteurs de Bukanga Lonzo et Musamba et autour de la cité de Kenge. Ailleurs la savane arbustive prédomine, dans le secteur de Dinga, Pelende Nord et Kolokoso. En ce qui concerne l’écosystème herbacé, plusieurs physionomies peuvent être observées. Il existe des formations dominées par Pteridium aquilinum, Aframamum alboviolaceum et d’autres espèces du genre Andropogon.

Les forêts ombrophiles denses humides peuvent être d’anciens lambeaux forestiers de forêts denses de terre ferme et hydromorphe qui sont surtout présentes le long de la rivière Bakali (principal affluent de la rivière Wamba), de la Wamba et du Kwango. Elles peuvent se prolonger en profondeur de dix/quinze kilomètres dans certains groupements (Kapay et Intu Nzadi dans Kolokoso, Kianfu Kinzadi dans Musamba, Kasongo Dinga et Kasinzi, Mukukulu, Mboso Mwanga, Bomiyanga, Binda Nzadi dans le secteur de Dinga, Swa Yamfu, Kobo, Munene, Musongo Nsete, Kifundisa, Munikenge, Mwela Nsay, Kalenge, Kibwila, Nzaw Musitu dans le secteur de Pelende Nord, Kasanzi, Binda Nseke, Kakundi, Kafulu, Ikwaku dans le secteur de Bukanga Lonzo).

Il reste des ensembles forestiers disposant encore d’essences de valeur le long de la Bakali et de la Wamba. La végétation de Kenge est dominée par des galeries forestières, les formations herbeuses arbustives et des forêts des ravins (Devred, 1958). L’action de l’homme est généralement destructrice pour la végétation de Kenge. L’agriculture itinérante sur brûlis, la déforestation, le feu de brousse incontrôlé, conduisent à la savanisation de l’écosystème forestier de cette vallée. Ce qui fait que la végétation de la Wamba est constituée en majeure partie des savanes herbeuses et boisées sur un plateau et une partie de galeries forestières le long de la rivière Kinsanga (un autre affluent de la rivière Wamba) qui se poursuit jusqu’à la rivière Wamba.

3.2. Matériel

Pour cette recherche, les organes essentiels de la plante sous étude, sont considérés comme matériel botanique qui a été utilisé pour faciliter l’identification scientifique au laboratoire. Il en est de même pour les espèces accompagnatrices de ce peuplement. Il s’agit ici des feuilles et rhizome de l’espèce, c’est-à-dire: Pteridium aquilinum et les échantillons botaniques des espèces qui accompagnent le peuplement de Pteridium aquilinum. Les organes (rhizomes, feuilles) de l’espèce ont servi pour la manipulation au laboratoire surtout sur les pesés et le séchage pour obtenir le poids frais et sec du matériel étudié. En dehors de ce matériel, les équipements suivants ont été utilisés lors des recherches sur le terrain et au laboratoire:

3.3. Méthodes

Les observations (description, analyse et synthèse), les inventaires, l’expérimentation sur l’extraction de la teneur en eau et l’obtention de la fraction minérale du matériel étudié constitue la démarche méthodologique.

Les observations ont consisté à la visite terrain, la prospection du site de l’étude et à effectuer l’inventaire. Les travaux de laboratoire ont visé les identifications scientifiques des espèces du peuplement sous étude, et l’étuvage pour extraire l’eau et déterminer ainsi la teneur en eau contenue dans les organes de la plante étudiée. Pour se faire, le cheminement de la démarche méthodologique se présente de la manière suivante:

3.3.1. Prospection du milieu et choix des sites

Les prospections sont réalisées sur le terrain c’est-à-dire dans la vallée de la rivière Wamba. Celles-ci étaient faites en deux étapes essentielles: il s’agissait d’abord des observations globales dans la vallée de la rivière Wamba à partir de l’outil de télédétection Google Earth. Ces prospections aériennes ont permis dans un premier temps de localiser les sites dans les formations herbacées de l’aire de l’étude ou l’on peut observer des peuplements très denses à Pteridium aquilinum. Les prospections aériennes ont été confrontées à la réalité du terrain. Sur la base des visites dans la vallée de la Wamba, les conclusions ont été tirées et motivées pour effectuer cette recherche sur la biomasse et services environnementaux des peuplements à Pteridium aquilinum. Les travaux sur terrain ont concerné la localisation, délimitation du site, la subdivision de site en placettes, les inventaires dans un dispositif d’un hectare ou le peuplement de Pteridium aquilinum était absolument dense et les récoltes du matériel ont été effectuées au mois de décembre 2022.

3.3.2. Inventaire et taille d’échantillon

Après la localisation de l’aire de l’étude, il était question ainsi de procéder à la mise en place du dispositif d’inventaire. Les analyses ou études de biomasse de l’espèce Pteridium aquilinum ont été effectuées dans une superficie d’un hectare. Cet hectare constitue la taille du dispositif installé sur le terrain pour étudier le peuplement de l’espèce. Souvent pour des inventaires, la taille des placettes varie selon l’étude et les objectifs poursuivis (Ntalakwa Makoloet al., 2022) la taille standard des placettes atteint 400 m² (Methot, 2014; Ntalakwa Makol et al., 2023; Kidikwadi, 2018). Etant donné qu’un hectare mesure 10000 m²; le dispositif a été divisé en 25 placettes. Les 25 placettes constituent donc la taille de l’échantillon pour cette recherche. Les 25 placettes étaient installées dans quatre sites différents ou le peuplement à Pteridium aquilinum était très dense.

3.3.3. Récolte du matériel

Dans le dispositif d’inventaire, les échantillons botaniques (feuilles, rhizomes) ont été récoltés dans le but de faciliter leurs identifications scientifiques au laboratoire de systémique, biodiversité, conservation de la nature et savoirs endogènes à l’aide des catalogues de clef d’identification et de la flore du Congo-Belge et du Rwanda-Urundi, à l’Herbarium de l’INERA de l’Université de Kinshasa. Cette identification a été faite selon la révision actuelle de la classification selon l’APG III et IV. L’étape de l’identification s’avère très importante et a nécessité la confirmation des observations faites sur le terrain par les spécialistes. Le matériel récolté a également fait l’objet d’autres traitements tels que le séchage et la conservation dans les papiers journaux.

3.4. Détermination de biomasse de Pteridium aquilinum (Lin.) Kuhn

3.4.1. Travaux de terrain

Pour déterminer la biomasse de cette espèce vivace, la méthode directe qui consiste à abattre ou déraciner l’espèce, a été exploitée pour faciliter les mesures de la biomasse totale de la partie aérienne (feuilles) et souterraine (rhizome).

Dans ce cas, un dispositif des placettes de 20 x 20 m soit 400 m2 dans des sites différents a été mis en place. En pratique, tous les individus de Pteridium aquilinum ont été arrachés. Cependant, la partie aérienne composée des feuilles a été séparée de la partie souterraine (c’est-à-dire les rhizomes). Après avoir séparé les feuilles avec les rhizomes, deux composantes ont fait l’objet des pesées séparément pour obtenir la masse de la matière humide sur le terrain.

3.4.2. Mesure de la masse des échantillons à l’aide d’une balance

Les échantillons prélevés dans une superficie de 400 m² ont été réunis, emballé et pesé à l’aide d’une balance portatif tel qu’on illustre ci-dessous.

Photos 1 et 2. Pesés des échantillons frais de Pteridium aquilinum sur le terrain. Source: photos personnel prise sur terrain.

3.4.3. Travaux de laboratoire

Les travaux de laboratoire ont consisté au séchage des échantillons à l’étuve pour obtenir le poids sec. En effet, les échantillons prélevés sur le terrain sont acheminés au laboratoire d’Ecotoxicologie du département de sciences de l’environnement pour séchage à l’étuve. Ces échantillons ont été emballés dans les papiers aluminiums puis introduit à l’étuve pour le séchage. Les échantillons à l’étuve étaient soumis à une température de 80° Celsius et faisaient l’objet des pesés après chaque 24 heures jusqu’à obtenir une stabilité du poids c’est-à-dire jusqu’à l’élimination complète de l’eau. Cette démarche est appliquée par plusieurs chercheurs notamment Rondeux (1999) et Cyprien (2017).

3.4.4. Procédure pour déterminer la biomasse totale du peuplement de Pteridium aquilinum

Le seul fait de considérer un peuplement implique le recours à l’échantillonnage étant donné que dans la région on peut facilement trouver des peuplements denses dominés par l’espèce sous étude. Si toutes les composantes de la biomasse des plusieurs peuplements doivent être prises en compte, l’échantillonnage est évidemment d’autant plus complexe à réaliser.

La mesure de la biomasse demande un travail de terrain relativement important et un grand nombre de manipulations. Plusieurs méthodes de travail ont été expérimentées. Une des plus concrètes est décrite par Rondeux (1999) qui traite des opérations de terrain et de laboratoire et détaille la marche à suivre en fonction de la nature du matériel à mesurer. De manière générale, les diverses opérations peuvent être envisagées selon la séquence suivante:

Plus concrètement, en ce qui concerne cette recherche, pour déterminer la biomasse des rhizomes (tiges souterraines) et feuilles, on a procédé de la manière ci-après:

Le rapport entre la masse à l’état anhydre et la masse à l’état humide de l’échantillon est alors appliqué à la masse à l’état humide totale afin d’estimer la masse à l’état anhydre totale. En ce qui concerne les feuilles, selon l’importance du feuillage, on a effectué une pesée de la masse foliaire totale avant et après séchage. Celui-ci peut consister à prélever des rameaux feuillés et à utiliser des relations entre le nombre de feuilles et la longueur des rameaux. En ce qui concerne les racines ou rhizomes, la détermination de la biomasse est nettement plus complexe puisqu’il faut en principe extraire du sol les systèmes racinaires. Plusieurs méthodologies destinées à alléger le travail reposent sur l’analyse d’échantillons, par exemple d’un volume déterminé de sol, ou sur la prise en considération de certaines dimensions de racines. La plupart des études entreprises sur ce thème sont orientées vers la recherche de relations satisfaisantes entre la biomasse des racines ou rhizomes et l’une ou l’autre caractéristique du sol, de l’espèce ou du peuplement. Le rapport entre la masse fraîche et à l’état sec est obtenu par soustraction, c’est-à-dire poids frais moins l’eau. Dans ce même ordre d’idée, l’ensemble de ces opérations a été effectué d’abord sur le terrain pour l’obtention de masse en état frais et par la suite au laboratoire à l’étuve pour obtenir le poids sec ou la fraction minérale de la ressource.

3.4.5. Prise de coordonnées géographiques

A l’aide du GPS (système de positionnement global) de marque GARMIN, on a procédé à la prise des coordonnées géographiques dans le milieu. Cette action était importante pour localiser l’aire de l’étude. Les coordonnées ont servis à l’élaboration de la carte du milieu d’étude c’est-à-dire la vallée de la Wamba en République Démocratique du Congo.

3.4.6. Dépouillement et Traitement des données

Le dépouillement proprement dit a commencé par l’enregistrement de la masse des échantillons frais de chaque site et par la suite le poids sec de ces échantillons après séchage à l’étuve. Il s’est avéré qu’on puisse recourir à l’outil informatique pour la saisie et les traitements des données.

4. RESULTATS

Cette partie de la recherche présente les résultats des investigations menées sur le terrain et celles effectuées au laboratoire. Elle examine, analyse et commente aussi ces résultats en référent aux résultats des études antérieures afin de tirer des conclusions qui corroborent avec la réalité sur le terrain. Les résultats présentés dans cette section concernent plus les aspects ci-après: la composition floristique des espèces des sites étudiés (espèces qui forment des groupements végétaux avec le peuplement à Pteridium aquilinum), la détermination du poids frais et du poids sec des individus extirpés, la teneur en eau, la biomasse, le carbone séquestré, l’équivalent carbone et les services environnementaux offerts par les peuplements dominés par les individus de l’espèce sous étude.

4.1. Composition floristique des sites étudiés

Dans cette section il s’agit de présenter la composition floristique des espèces qui accompagnent le peuplement à Pteridium aquilinum. Ceci donne une idée sur l’écologie de l’espèce et la physionomie du peuplement. La composition floristique du site étudié fait état de 11 espèces reparties en 8 familles et 11 genres. Le tableau 1 suivant présente la liste des espèces étudiées dans l’aire de l’étude.

Tableau 1. Composition floristique des espèces accompagnatrices du peuplement à Pteridium aquilinum.

Famille

Espèces

Phyllanthaceae

Hymenocardia ulmoides Oliv.

Phyllanthaceae

Hymenocardia acida

Euphorbiaceae

Chaetocarpus africanus Pax

Euphorbiaceae

Sclerocroton cornutus (Pax) Kruijt & Roebers

Euphorbiaceae

Croton hirtus Herit

Asteraceae

Chromolaena odorata (L.) R. M.King & M. Robyns

Dioscoreaceae

Dioscorea dumentorum (Kunth.) Pax

Dioscoreaceae

Dioscorea smilacifolia De Wild.

Poaceae

Digitaria polybotria Stapf-GBIF

Cucurbitaceae

Cogniauxia podolaena Baill.

Smilacaceae

Smilaps anseps Willd. (Syn. S. kraussiana Meisn.)

Fabaceae/ Mimosoideae

Pentaclethra eetveldeana De Wild. & Th. Dur.

Source: tableau élaboré sur base des données personnelles récoltées sur terrain.

Les résultats obtenus sur la composition de la flore du site d’étude montrent que les familles d’Euphorbiaceae et Dioscoreaceae dominent, d’autres familles sont faiblement représentées. La plupart de ces espèces sont des herbes thérophytes qui s’adaptent au feu de brousse. Il s’agit aussi de quelques arbustes qui sont souvent observés dans les formations herbacées de la région. C’est le cas notamment de Hymenocardia acida.

4.2. Détermination du poids frais des organes de l’espèce étudiée

Pour rappel, dans le milieu d’étude, les individus de l’espèce Pteridium aquilinum ont été abattus, arrachés (méthode directe), séparés puis pesés immédiatement à la balance pour obtenir le poids frais du peuplement de l’espèce en vue de déterminer sa biomasse réelle. Les résultats obtenus dans le site d’étude sont repris dans la figure suivante. La figure 1 montre les poids frais de différents organes ou composantes (feuilles et rhizomes) après avoir pesé sur le terrain dans les parcelles. Ils sont présentés de la manière: pour les feuilles (colorée en noire): 9,8 kg pour la première parcelle; 8,6 kg pour la deuxième parcelle; 13,7 kg pour la troisième parcelle et en fin 16,3 kg pour la quatrième parcelle. Pour les rhizomes (colorée en rouge): 3,6 kg pour le premier site; 3,3 kg pour le deuxième; 4,2 kg pour le troisième et en fin 4,8 kg pour le quatrième site.

Figure 1. Masse fraîche des organes de l’espèce étudiée. Source: élaborée sur base des données personnelles issues des observations du terrain.

4.3. Poids sec des organes des individus de Pteridium aquilinum après séchage à l’étuve

Pour compléter l’information sur la masse de la matière minérale contenue dans les organes de cette espèce, il était question de sécher les échantillons à l’étuve pour obtenir le poids sec. La figure 2 montre les poids secs de différents organes ou composantes (feuilles et rhizomes) après séchage au laboratoire sur les échantillons récoltés dans le quatre différents sites de l’aire étude. Ils sont présentés de la manière: pour les feuilles 3,7 kg pour le premier site; 3,1 kg pour la deuxième parcelle (site); 4,9 kg pour la troisième parcelle (site) et enfin 6,2 kg pour le quatrième site. Pour les rhizomes 1,2 kg pour la première parcelle (site); 0,98 kg pour le deuxième site; 1,45 kg pour le troisième site et enfin 1,9 kg pour le quatrième site. La figure 2 illustre les observations faites sur le poids sec des organes de cette espèce.

Figure 2. Masse sèche des organes après étuvage. Source: données personnelles.

4.4. Evolution du poids des organes étudiés après étuvage

Pour déterminer le poids sec des organes étudiés, le séchage du matériel dans l’étuve a été réalisé dans le but d’éliminer l’eau et obtenir ainsi la fraction minérale contenu dans les tissus des organes de l’espèce sous étude. Le tableau 2 et 3 présentent l’évolution du poids des organes après étuvage le premier et le deuxième jour.

Tableau 2. Evolution du poids des échantillons après étuvage au laboratoire le premier 24 heures.

Composantes

Jours

Sites

Durée

Heures

Poids

Feuilles

1er 24h

1

24h

De 10h 30’ à 10h30’

60°C

4,6 kg

2

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

4,2 kg

3

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

5,3 kg

4

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

7,4 kg

Rhizomes

1er 24h

1

24h

De 10h 30’ à 10h30’

60°C

2,2 kg

2

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

1,8 kg

3

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

2,2 kg

4

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

2,6 kg

Source: données personnelles.

Comme on peut le remarquer dans le tableau ci-dessus, après étuvage le premier jour le poids des feuilles s’élevait à 7,4 kg alors que les rhizomes pesaient 2,6 kg.

Tableau 3. Evolution du poids des échantillons après étuvage au laboratoire le deuxième jour.

Composantes

Jours

Sites

Durée

Heures

Poids

Feuilles

2e24h

1

24h

De 10h 30’ à 10h30’

60°C

3,7 kg

2

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

3,1 kg

3

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

4,9 kg

4

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

6,2 kg

Rhizomes

2e24h

1

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

1,2 kg

2

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

0,98 kg

3

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

1,45 kg

4

24h

De 10 h 30’ à 10 h 30’

60°C

1,9 kg

Source: données personnelles.

Le tableau ci-dessus relève qu’après étuvage le deuxième jour le poids des feuilles atteint au maximum 6,2 kg alors que les rhizomes pesaient 1,9 kg.

4.5. Teneur en eau dans les organes des individus de Pteridium aquilinum dans le site étudié

Il s’agit ici de déterminer la teneur en eau contenue dans les organes des individus qui composent ce peuplement à Pteridium aquilinumdans la zone d’étude. Cette teneur est issue de la différence entre la masse des organes à l’état frais et celle de la masse des organes à l’état sec. Pour rappel, cette teneur en eau est déterminée après l’extraction de l’eau dans les tissus des individus de l’espèce sous étude après étuvage au laboratoire. La figure 3 montre la teneur ou la différence de la masse entre le poids frais et le poids sec pour l’organe feuilles.

Figure 3. Teneur en eau dans les feuilles de Pteridium aquilinum. Source: données personnelles.

Teneur en eau contenue dans les rhizomes des individus qui forment le peuplement de Pteridium aquilinum (figure 4) montre la teneur ou la différence de la masse entre le poids frais et le poids sec pour la partie souterraine de la plante (rhizomes). Les poids sont présentés de la manière suivante: 2,1 kg pour le premier site; 2,32 kg pour la deuxième parcelle (site); 2,75 kg pour le troisième site et enfin 2,3 kg pour le dernier site.

Figure 4. Teneur en eau dans les rhizomes. Source: données personnelles.

4.6. Biomasse, carbone séquestré et équivalent carbone des peuplements de Pteridium aquilinum

Les différentes démarches menées sur le terrain avaient comme finalité la détermination de la biomasse de peuplement de Pteridium aquilinum, herbe vivace qui contribue à la séquestration de carbone et à la lutte contre le changement climatique. La figure 5 montre la quantité de la biomasse, carbone séquestré et équivalent carbone en t/ha. Il s’agit donc des résultats obtenus après les différentes observations sur le terrain et ensuite au laboratoire de Systémique Biodiversité, Conservation de la Nature et Savoirs Endogènes. Les résultats obtenus se présentent de la manière suivante: 6,07 t/ha de la biomasse; 2,75 t/ha du carbone séquestré et en fin 22,27 t/ha d’équivalent carbone.

Figure 5. Biomasse, carbone séquestré et équivalent carbone en t/ha. Source: données personnelles.

4.7. Services environnementaux rendus par le peuplement à Pteridium aquilinum

Le peuplement à Pteridium aquilinum joue aussi un rôle important dans la réduction de dioxyde de carbone de l’atmosphère et contribue ainsi dans les mesures d’atténuation au changement climatique. Les individus du peuplement réalisent la photosynthèse et stockent le carbone dans leurs tissus. Cette recherche relève une valeur de 2,75 t/ha de carbone séquestré par les individus de l’espèce sous étude. Les jeunes pousses des individus de l’espèce susmentionnée sont consommées comme légume par les communautés riveraines de cette vallée et peuvent même alimenter un petit commerce au niveau local et voir dans les centres urbains comme Kenge et Kinshasa. Cette même espèce constitue aussi une plante hôte pour les chenilles qui consomment les feuilles et dont plusieurs espèces de papillons peuvent pondre leurs œufs. C’est une plante à usage multiple bien qu’évoluant dans les formations herbacées. Pendant la saison de pluie et même durant la saison sèche, les individus de l’espèce sous étude gardent toujours leurs feuilles vertes. En d’autres termes ces individus réalisent la photosynthèse durant toute l’année contrairement à plusieurs autres espèces forestières qui perdent leurs feuilles pendant la saison sèche. Ces arguments affirment encore une fois de plus, les considérations sur la contribution des peuplements de cette espèce dans la lutte contre le réchauffement climatique, un problème environnemental majeur qui affecte l’humanité tout entière actuellement.

4.8. Multiple usage de l’espèce

Au Kwango, dans le Kwilu et plus particulièrement dans la vallée de la Wamba, la population consomme les jeunes pousses comme légume. Les individus de cette espèce sont aussi utilisés en médecine traditionnelle pour le traitement de plusieurs maladies ou traumatismes. C’est le cas pour les douleurs thoraciques ou la sève peut être consommée pour soulager la douleur thoracique. En outre, l’espèce est reconnue pour ses vertus dans le traitement des hémorroïdes. Le peuplement de cette espèce peut servir de fourrage pour le bétail. La plante est hôte pour l’espèce de chenille: Imbrasia anthina (Munsuku en Kikongo) comestible et très souvent recherchée par les villageois. Ces multiples usages font que l’espèce puisse connaître une forte pression. Les jeunes pousses sont commercialisées, alors que jusqu’ici l’exploitation de l’espèce se fait dans le circuit informel.

4.9. Végétation à Pteridium aquilinum

Dans la vallée de la Wamba au Kwango tout comme au Kwilu en République Démocratique du Congo, on peut facilement observer des vastes étendues de formations végétales dominées par les individus de Pteridium aquilinum qui forment des populations beaucoup plus compactes et homogènes. Il importe donc de préciser que dans ce type de végétation, sont parsemées quelques espèces de formation herbacée qui accompagne le peuplement de cette espèce. C’est le cas notamment des espèces suivantes: Hymenocardia acida, Hymenocardia ulmoides, Digitaria polybotria etc. cette végétation évolue plus dans les zones des pentes et est plus soumise au feu de brousse alimenté par l’homme.

5. DISCUSSION

Cette étude sur la biomasse et service environnemental de Pteridium aquilinums’est effectuée dans les formations herbacées de la vallée de la Wamba en RDC. La zone d’étude s’intègre dans le Secteur phytogéographique du Kasaï, entité phytogéographique de la zone de transition régionale guinéo-congolaise-zambézienne (Belesi, 2009; Vermeule & Lanatat., 2006; Toung, 2010). Dans cette zone, il existe des vastes étendues de formations herbeuses surtout qui colonisent les zones des plateaux (Ntalakwa Makolo, et al., 2022; Ntalakwa Makolo, et al., 2023). Les prospections et les récoltes sur le terrain ont été faites et les résultats obtenus attestent que la composition floristique des espèces accompagnatrices de peuplement de Pteridium aquilinumde la zone étudiée fait état de 11 espèces reparties en 8 familles et 11 genres. Les familles d’Euphorbiaceae et Dioscoreaceae dominent et d’autres familles sont faiblement représentées. Rappelons que la biomasse obtenue dans la présente étude, est issue des échantillons des individus de Pteridium aquilinumprélevés dans les sites ou parcelles du milieu d’étude. Les résultats obtenus sur la biomasse de l’espèce montrent à suffisance que les espèces de savane participent ou contribuent également à la lutte contre le changement climatique malgré que très souvent on n’accorde pas assez d’importance pour les recherches sur la biomasse des herbes vivaces. Les résultats sur la biomasse de peuplement de Pteridium aquilinum attestent que pour une superficie d’un hectare, une biomasse totale de 6,07 t/ha a été relevée. Ce peuplement séquestre 2,75 t/ha de carbone alors que la valeur de l’équivalent carbone s’élève à 22,27 t/ha. Le peuplement de Pteridium aquilinum présente une physionomie homogène, très dense et luxuriante. Ces résultats se rapprochent de ceux de Cyprien Alexandre (2017) qui a estimé la biomasse de Penicetum à 8, 12 t/ha dans son étude sur la biomasse fourragère dans les prairies de la Réunion. Cependant, les résultats sur la biomasse de Pteridium aqulinum s’écartent de ceux rapportés par Kidikwadi (2012). En effet dans son étude sur la phytomasse aérienne de peuplement de Dialum englerianum et Hymenocardia acida dans le domaine de chasse de Bombo-Lumene, les résultats obtenus relèvent une biomasse de 45 ± 8,4 t/ha pour Dialum englerianum. Ces résultats sont différents du peuplement de Pteridium aquilinum. Cet écart des résultats se justifie dans ce sens que ces deux espèces présentent une composition physico-chimique différente voir même la structure et où la morphologie. En outre les procédés utilisés pour arriver aux résultats ne sont pas les mêmes. La biomasse des peuplements à Dialum englerianum et Hymenocardia acida a été estimée par la méthode indirecte, en utilisant les équations allometriques tandis que pour la biomasse de l’espèce concernée par cette recherche, la démarche a consisté à l’utilisation de la méthode directe pour obtenir la biomasse réelle. La conservation des espaces couverts par les plantes constituent un moyen efficace pour la réduction de dioxyde de carbone atmosphérique (GIEC, 2007). Les vastes étendues des peuplements de Pteridium aquilinum sont souvent sauvagement brûlées pendant la saison sèche sans toutefois tenir compte du fait que cette espèce joue un rôle important non seulement dans l’alimentation mais aussi dans la lutte contre le réchauffement climatique étant donné que l’espèce réalise la photosynthèse presque toute l’année. Les résultats des observations faites sur terrain confirment que l’espèce sous étude garde toujours ses feuilles vertes pendant la saison sèche. Cet aspect relève que contrairement à quelques espèces forestières (Bossekota & Sabiti, 2005; Clément, 1982) qui perdent les feuilles pendant la saison sèche, Pteridium aquilinumpeut donc réaliser la photosynthèse durant tout le cycle de sa vie active et ceci est une bonne nouvelle dans la lutte pour la réduction de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Cette activité de Pteridium aquilinum favorise non seulement la régulation du climat, mais aussi l’espèce rend un service environnemental et fournie des éléments nutritifs pour cette population de la région de Kenge en forte croissance démographique. Pteridium aquilinum présente aussi une valeur économique énorme dans la mesure où les jeunes feuilles sont commercialisées dans les villes et villages où elles sont consommées comme légume (Bamps, 1982; Ntalakwa Makolo, et al., 2022). Cette espèce compte parmi les ressources non ligneuses qui mérite d’être valorisée (Biloso, 2008).Toutes ces vertus accordent à cette espèce toute sa valeur dans la lutte contre le changement climatique dans la fourniture de divers services environnementaux et vitaux.

Le peuplement de Pteridium aquilinum fournie plusieurs services environnementaux. En dehors du fait que les individus réalisent la photosynthèse, séquestrent le carbone et réduisent par conséquent la concentration de dioxyde de carbone atmosphérique nécessaire à la lutte contre le changement climatique, cette espèce est connue pour plusieurs autres vertus. L’espèce constitue une plante hôte des chenilles comestibles; notamment Imbrasia anthina. Cette espèce de chenille (Imbrasia anthina) comestible dans la région, consomme les feuilles des individus de Pteridium aquilinum, pond des œufs sur la face inférieure de la feuille des individus de l’espèce sous étude. En d’autres termes, les individus de l’espèce Pteridium aquilinum constituent une niche écologique pour cette espèce de chenille comestible en occurrence Imbrasia anthina. Cela veut dire aussi, les individus de cette fougère jouent un rôle important pour la reproduction et l’existence même de cette espèce de chenille. La rareté ou la destruction des peuplements de cette espèce par le feu de brousse incontrôlé va empêcher la reproduction de cette espèce de chenille et par conséquent va influencer sur sa population et la disparition progressive de l’espèce de chenille concernée au niveau local. Cela revient à dire que la protection ou la conservation des peuplements de Pteridium aquilinum va impacter positivement sur la conservation ou la pérennité de l’espèce Imbrasia anthina. Les jeunes pousses des individus de Pteridium aquilinum étant comestibles, consommées comme légume, celles-ci peuvent alimenter le petit marché pour le commerce tant en milieu rural qu’en milieu urbain (Ntalakwa Makolo, et al., 2022). Cela étant, cette ressource forme une gamme des produits qualifiés des ressources non ligneuses. La valorisation des potentialités de cette espèce peut aussi servir pour contribuer à la génération de sources de revenus pour les communautés locales. A ce stade, son exploitation reste informelle, sans une réglementation. Cette situation permet ou ramène les villageois à l’exploiter abusivement sans contrainte particulière et à dégrader des vastes étendus de peuplement de cette espèce par le feu de brousse. Cette façon de faire ne garantit pas une bonne gestion de la ressource et représente un danger, une menace ou un risque sur la viabilité à long terme de l’écosystème herbacé dominé essentiellement par les individus de cette plante.

6. CONCLUSION

Les résultats de la présente recherche constitue une contribution à la connaissance de la biomasse et les services environnementaux: la séquestration de carbone, la régulation du cycle de l’eau, la protection du sol, c’est-à-dire les fonctions écologiques qui se rapportent au cycle de vie de l’espèce Pteridium aquilinum. Elle s’intéresse à la production de l’herbe vivace et se focalise sur la valorisation, l’utilisation et la conservation de la ressource. La démarche utilisée apporte l’innovation par qu’elle aborde une approche systémique ou holistique dans l’étude du peuplement de l’espèce et démontre les relations existantes entre le cycle de vie de l’espèce, ses services pour l’environnement et les mécanismes qu’il faut mettre en place pour gérer rationnellement la ressource en se basant aussi sur le savoirs endogènes des communautés locales. L’étude sur la biomasse et les services environnementaux de peuplement à Ptéridium aquilinum s’inscrit dans le cadre de la protection de l’environnement et des ressources naturelles biologiques. Elle a montré la contribution des peuplements de cette espèce de fougère dans les mesures de lutte contre le réchauffement climatique. L’aire de l’étude s’intègre dans la zone de transition régionale guinéo-congolaise-zambézienne plus précisément dans les formations herbacées localisées le long de la vallée de la rivière Wamba en RDC (République Démocratique du Congo). Pour y parvenir, les observations et les inventaires floristiques appuyés par une méthode directe qui consiste à défricher ou extirper les individus de l’espèce, constituent la démarche méthodologique utilisée pour l’étude de la biomasse totale de l’espèce concernée. Après traitement et analyse des données récoltées sur le terrain, les principaux résultats retenus se présentent de la manière suivante: 6,07 t/ha de la biomasse; 2,75 t/ha du carbone séquestré et en fin 22,27t/ha d’équivalent carbone. L’inventaire a mis en évidence 11 espèces reparties en 8 familles et 11 genres sur les quelles, l’espèce Pteridium aquilinum est la plus dominante car disposant de plusieurs individus dans notre milieu d’étude. Les résultats obtenus prouvent que les savanes constituent des puits importants de stock de carbone. Le peuplement à Pteridium aquilinum contribue dans le processus de réduction de dioxyde de carbone atmosphérique et ceci peut servir de base pour la conservation des vastes étendus colonisés par les individus de cette espèce vivace qui, très souvent sont victimes de feu de brousse. En perspectives, vu les résultats obtenus, il est souhaitable que les recherches sur la biomasse et les services écosystémiques des espèces de la flore agrostologique de la région puisse continuer pour la conservation et la gestion durable des espaces couverts par ces espèces et limiter ainsi les effets néfastes de feu de brousse causé par l’homme sur l’environnement et les ressources biologiques.

Responsabilités et conflits d’intérêts

Les auteurs affirment en toute conscience que les résultats de cette recherche ne font l’objet d’aucun conflit d’intérêt. Les contributions des auteurs se présentent de la manière suivante: Ntalakwa Makolo Théophane est l’auteur principal; a assuré les visites sur le terrain, et la rédaction du texte final. Mayanu Pemba Bibiche et Kisangala Sarah ont assuré la collecte des données sur le terrain, la prise des photos. Akatumbila Luganga s’est occupé des travaux de laboratoire. Kidikwadi Tango Eustache a assuré l’élaboration des figures et la supervision du travail. Belesi Katula Honoré et Lubini Ayingweu Constantin ont identifié les espèces, ont corrigé et validé le texte final.

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